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Algérie: le mouvement citoyen des Aarchs commémore le «printemps noir»

le Mouvement citoyen Berbère commémore le printemps noir
Ils sont venus avec des gerbes de fleurs et des slogans en cascade, qui disent l’amertume et le sentiment de révolte. Comme chaque année, le mouvement citoyen Berbère commémore le « printemps noir », notamment les émeutes de 2001 qui ont fait plus d’une centaine de morts parmi les jeunes.

La tombe de Guermah Massinissa, jeune homme tué derrière les murs de la gendarmerie de Beni Douala, village Kabyle fier et haut perché, regarde éternellement vers des monts encore coiffés d’un chapeau neigeux en ce mois d’avril.

Sa mort avait mis le feu aux poudres, embrasant toute la Kabylie, provoquant de violentes émeutes qui se sont malheureusement soldées par plus d’une centaine de morts et des dizaines de blessés et handicapés.

Comme chaque année, le 18 avril, jour de l’assassinat de Massinissa, ils se serrent autour d’une tombe fleurie. Militants du Mouvement des Arouchs et autres citoyens ont le cœur gros, la mémoire douloureuse et l’envie d’en découdre avec le pouvoir plus que jamais vive.

Et pour cause, ils mesurent tristement que rien n’a changé, depuis le bras de fer engagé avec les autorités autour d’une «plate-forme» rassemblant les revendications du Mouvement. Ils constatent que le désespoir ronge toujours la jeunesse, que «le pouvoir n’a pas respecté tous ses engagements» à l’égard de la question identitaire et que surtout, «l’impunité persiste», les auteurs des crimes s’étant tiré plutôt à bon compte.

Le candidat Abdelaziz Bouteflika n’a-t-il pas évoqué, lors de sa campagne et de façon d’ailleurs surprenante, «les martyrs de la Kabylie» ? Alors, plus que jamais, «il faut réaffirmer l’exigence de justice!», martèle le très charismatique Belaid Abrica, chef de file du Mouvement citoyen.

Béjaïa, Tizi-Ouzou, Boumerdès, Sétif, Alger, Tipasa… les représentants du Mouvement prennent tour à tour la parole, relayés par des militants associatifs, des parents de victimes et handicapés. Tous partagent la même détermination : mettre fin aux divisions, reconstituer l’unité du Mouvement Citoyen Berbère et aller de nouveau sur le terrain des luttes, à la conquête de la liberté d’expression, de l’affirmation de l’identité Amazigh, des droits sociaux, de la justice et de la solidarité nationale.

Dans un village niché plus bas, à Taourit Moussa, repose le chanteur Matoub Lounès, assassiné un jour de juin 1998, dans des conditions qui demeurent floues, et dont la famille réclame toujours une véritable enquête et un procès en bonne et due forme. Les proches du chanteur estiment que la Justice a été expéditive, se contentant de l’incarcération d’un présumé coupable dont le dossier est vide de preuves, selon ses avocats.

Rendez-vous au 1er Mai

Un l’hommage est rendu au chanteur sous une pluie battante. La présence de sa mère à l’accueil de la fondation qui porte son nom, face à la voiture témoin criblée de balles, rappelle que les dix années écoulées n’ont pas étanché la soif de vérité. Articles de presse et photos qui tapissent le mur répandent le cri du «rebelle». Sa musique et ses paroles sont partout, mêlées à une odeur d’encens. Et il y a, malgré la tristesse des lieux, comme une ambiance de fête, de victoire contre le despotisme, l’obscurantisme et toutes les régressions. Ici, Matoub Lounès est vivant, il fait un pied de nez à la mort et à ses assassins.

Autre moment fort de cette journée commémorative : débat et échanges d’opinion au cœur de la ville des genêts, au siège du Mouvement citoyen Berbère, qui fait face, ironie du sort, à une caserne de l’armée. Au fil des prises de paroles, une seule et même idée rebondie sans cesse : « ne pas à se résigner à l’impunité » des pyromanes qui ont mis un jour le feu dans les montagnes de Kabylie, transformant le « printemps berbère » en une coulée de deuil au creux de la mémoire collective. Mais pas seulement. Il y a là aussi, des militants associatifs et politiques qui appellent au « rassemblement » des forces progressistes face à l’autosatisfaction du pouvoir qui laisse s’étendre la pauvreté et flamber la corruption.

Rendez-vous est pris pour le 1er mai, à l’appel des « syndicats autonomes », organisations réfractaires à la pensée unique sur le terrain des luttes sociales.

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